Les Beni Merin étaient originaires de Taza, à l’est de Fès,
sur la route de Tlemsen ; ils appartenaient par leurs ancêtres à
la puissante tribu des Zenata ; avant le démembrement de l’empire
des Almohades, ils avaient été souvent leurs plus fermes
auxiliaires pour réprimer les révoltes, et avaient été nommés
gouverneurs d’une portion du pays, où leur autorité devint
ensuite indépendante. Le fondateur de cette dynastie fut Abou Iahia Abd-el-Hak. Il s’empara de Fès et de Tara, mit en déroute
l’armée de l’émir, almohade, Abou-Hafez Omar, en 635 (1237
de J. C.), et prit le titre de Moula-cheikh ( maure et seigneur).
Les successeurs d’Iakoub ne gardèrent pas longtemps la
possession de la totalité des contrées qui composaient son empire
dans le Maghreb-el-Aksa. En moins de cinquante années, neuf
princes furent investis du pouvoir souverain. Le principal instrument
de la ruine de cette dynastie fut la désunion; qui régna sans
cesse antre les membres de la famille royale. Les Beni Merin
luttèrent souvent avec avantage contre la dynastie rivale des
Beni Zian ; ils se rendirent maîtres plusieurs fois de Tlemsen, et
la fortune favorisa quelquefois leurs armes au point de les faire
avancer jusqu’à Tunis, après avoir soumis Arzeu, Mostaganem,
Bougie et Constantine: Mais ces succès furent toujours éphémères.
En 776 (1374 de J. C.), deux prétendants appartenant à la
famille royale réunirent leurs efforts, détrônèrent l’émir Es-Saïd
et partagèrent le Maroc en deux États, dont l’un eut Fès pour
capitale, et l’autre Maroc. Dans ces révoltes continuelles, les
troupes chrétiennes, qu’à l’exemple des Almohades les princes
mérinides entretenaient, intervinrent souvent, et firent arriver, au
pouvoir le prétendant qu’elles préféraient. Enfin, vers l’an 840
de l’hégire (1437 de J. C.), un prince mérinide ayant invoqué le
secours d’Abou-Farès, de la famille des Beni Hafèz, qui régnait
à Tunis, les Beni Merin furent chassés de Tlemsen et refoulés
dans le Maroc. Abou-Farès confi a le gouvernement de Tlemsen
à la famille berbère des Beni Ifren, qui se reconnut tributaire
du royaume de Tunis. Ainsi finit la domination des Mérinides;
elle dura environ deux cents ans, avec des vicissitudes si multipliées,
qu’elle ne put jamais réunir sous une autorité vigoureuse
les peuplades turbulentes du Maghreb-el-Aska. Après leur
chute, plusieurs petits États indépendants se maintinrent encore
dans le Maroc; mais leur histoire est tellement confuse, qu’on
ne peut la suivre avec quelque certitude. Cet état d’anarchie
et de tiraillements dura jusqu’au seizième siècle de notre ère,
époque où la famille des chérifs, qui règne aujourd’hui dans le
Maroc, reconstitua cet empire, et détruisit les établissements que les Portugais avaient formés dans cette partie de l’Afrique
C’est sous les derniers princes mérinides (1415 de J. C., 823
de l’hégire) que Jean Ier, roi de Portugal, dirigea une première
expédition contre Ceuta. Il s’empara de la ville, et y laissa une
forte garnison. En 1437, sous le fils et successeur de Jean 1er,
les Portugais opérèrent un nouveau débarquement pour attaquer
Tanger. La ville fut secourue par une armée musulmane considérable
; les chrétiens furent obligés de capituler et de laisser un
infant en otage comme garantie de l’exécution de la convention
qui leur permit de s’embarquer. Mais ce serait nous éloigner de
notre but, que de parler plus longuement des diverses tentatives
faites, dans la suite, par les rois du Portugal pour s’établir dans
le Maroc.
Son successeur Ioucef, profitant des rivalités qui éclatèrent
entre les derniers représentants de la famille des Almohades,
compléta par la défaite d’Édris ben Saïd la prise de possession
de tout le Maghreb-el-Aksa. Le fondateur du royaume de Grenade,
attaqué par Alphonse le Savant, roi de Léon et de Castille,
appela le fils d’Abou Iahia à son secours, et lui concéda les deux
villes de Tarifa et d’Algésiras. Après des succès sans importance
pour la cause de son allié, l’émir mérinide s’empara de
Malaga, au détriment du souverain de Grenade.
Son fils Iakoub
lui succéda, et s’empressa de conclure la paix avec Sanche III,
dit le Brave, qui avait hérité des couronnes de Léon et de Castille.
Ioucef passa alors en Afrique, pour y faire reconnaître son
autorité. Il tourna bientôt ses armes contre les Beni Zian, qui
venaient de surgir à Tlemsen et alla assiéger cette ville. Le siège
traîna en longueur, et ne dura pas, moins de sept ans. Le camp
des assiégeants se transforma en une ville assez considérable,
située à un quart de lieue de Tlemsen et qu’ils nommèrent El-
Mançoura (la victorieuse).
On voit encore aujourd’hui le mur
d’enceinte et le minaret de la mosquée de cette ville, qui n’a
plus ni maisons ni habitants.
Iakoub séjourna plusieurs années
en Afrique, engagé dans des luttes Continuelles avec les Beni
Zian; puis il se préoccupa de la situation de ses affaires en
Espagne. La ville de Malaga avait été livrée par un gouverneur
infidèle au roi de Grenade. Il avait réuni à Tanger une flotte considérable,
et se disposait à aller venger cette trahison, lorsque
Sanche III, son ancien allié, gagné par le roi de Grenade, vint
détruire sur la côte d’Afrique les bâtiments destinés au transport
de son armée.
A la suite de ce succès, Sanche s’empara de
Tarifa en 691 ([292 de J. C. ) ; quatre ans après, Iakoub, ne possédant
plus en Espagne que la ville d’Algésiras, renonça à toute
entreprise sur l’Andalousie, et céda cette place au souverain de
Grenade, moyennant une somme d’argent. La race berbère ne devait plus reparaître dans la péninsule ibérique.
L’histoire de l’Algérie ne se rattache plus que d’une
manière indirecte à ces événements.
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Mis en ligne le 13 décembre 2012