Les écrivains de l'antiquité n'avaient que des connaissances imparfaites sur les régions qui s'étendent depuis l'Égypte jusqu'à l'Océan. Plusieurs dénominations étaient employées pour désigner ces contrées ; la plus générale semble avoir été celle de Libye. Encore ne s'appliquait-elle qu'à la partie la plus rapprochée de l'Égypte ; car le disque terrestre d'Homère avait pour extrême limite occidentale une ligne descendant de l'île d'Elbe au promontoire de Carthage. Ce ne fut que dans l'année 639 avant l'ère chrétienne que le Samien Coléos, poussé par la tempête, dépassa le détroit des colonnes d'Hercule. Le nom d'Afrique ne fut substitué à celui de Libye que sous la domination carthaginoise. Employé d'abord comme dénomination du territoire propre de Carthage, il acquit successivement une acception plus générale, et servit enfin à désigner la totalité du continent. C'est une remarque qui se reproduit à l'occasion de chacune des principales révolutions de l'histoire de l'Afrique; la vie, le mouvement, l'action qui l'unissent au monde européen naissent, soit à l'orient, soit au nord, mais marchent et progressent constamment de l'orient à l'occident ; et les contrées les plus voisines de l'Océan arrivent toujours les dernières à prendre part à la civilisation nouvelle.

Les traditions les plus anciennes mentionnent des émigrations de peuplades de l'Asie dans le nord de l'Afrique. Ce sont d'abord des populations Cananéennes, qui, chassées de la Palestine et refoulées en Égypte, se répandirent dans les régions libyennes. A ces tribus vinrent se fondre de nombreuses colonies de Coptes, de Kouchytes, d'Arabes Sabéens, d'Amalécites et de Palestins. Ces émigrations semblent avoir formé la souche des Gétules, qui figurent dans l'histoire de l'Afrique musulmane sous le nom de Berbères. Dans cette fusion, chaque élément conserva cependant le souvenir de son origine distincte. Ainsi, les Senahdja, les Ketama, les Lamta, les Haouara, les Masmouda et les Laouata étaient issus des Sabéens de l'Yémen ; les Zenata descendaient des Amalécites, et d'autres, vulgairement nommés Djaloulia, représentaient la postérité de Goliath. Ces races constituaient avec les Libyens, considérés comme autochtones, la population du nord de l'Afrique. Les Libyens étaient plus particulièrement fixés vers le littoral et les diverses autres peuplades dans l'intérieur.

A ce premier flot d'émigration débordé de l'Orient sur la Libye succéda un mouvement en sens inverse, qui apporta des éléments nouveaux dans la composition de la population. C'est Salluste qui fournit ces renseignements, qu'il a empruntés aux livres du roi carthaginois Hiempsal Hercule, le conquérant asiatique, après avoir traversé en vainqueur toute la Libye, à la tête d'une armée immense, à laquelle toutes les nations de l'Asie avaient envoyé leur contingent, avait passé en Espagne. Là il fut trahi par la fortune, et périt dans une bataille. A la suite de cette catastrophe, son armée se débanda. Une partie passa en Afrique. Les Perses s'enfoncèrent dans le pays, en suivant les côtes de l'Océan, puis tournèrent vers l'est ; ils se mêlèrent aux Gétules, dont ils adoptèrent les habitudes nomades, changeant comme eux très fréquemment de campements; ils prirent le nom de Numides. Les Mèdes et les Arméniens s'unirent aux Libyens du littoral, et reçurent le nom de Maures, soit parce qu'ils étaient la population la plus occidentale, soit qu'on veuille voir dans le mot Maure une dérivation du mot Mèdes. Les Numides ne tardèrent pas à agrandir leur centre d'action ; leurs succès contre les indigènes les portèrent jusque sur le littoral e la Méditerranée, refoulant les Libyens vers l'est et arrêtant à l'ouest le mouvement d'expansion des Maures.

Si on peut ajouter foi à ces traditions africaines, c'est à cette époque reculée qu'il faut faire remonter la première constitution un peu précise, sur le territoire actuel de l'Algérie, d'une nation distincte, formée pair un mélange de Perses, de Gétules et de Libyens, et connue sous le nom de Numides. La population de la Libye se trouvait alors ainsi répartie : les Maures, les plus rapprochés de l'Espagne, occupant la partie occidentale ; puis plus à l'est, les Numides, qui s'étendaient depuis le fleuve Molouïa, jusqu'à la petite Syrte ; enfin, à l'extrémité orientale, les Libyens proprement dits, et derrière eux les Éthiopiens. Les Gétules, qui passent pour les ancêtres des Berbères d'aujourd'hui, étaient placés derrière les Numides, séparés d'eux par la chaîne de l'Atlas.

Le premier mouvement d'émigration partit de l'est ; le second, quoique également originaire de l'Orient, s'établit en Afrique par une expansion de l'ouest à l'est. La troisième accession de peuples étrangers arriva par le nord. D'autres races vinrent s'implanter, non plus comme éléments d'une fusion nouvelle, mais comme colonies conservant une nationalité séparée. Ce furent, d'une part, les Phéniciens de Tyr et de Sidon, qui fondèrent à l'ouest de la grande Syrte des comptoirs commerciaux, dont le plus considérable fut Carthage ; de l'autre part, ce furent les Grecs de Théra, qui s'établirent à l'est de la Syrte, et dont Cyrène devint la métropole principale. Les populations commencent à se classer ; les divisions territoriales deviennent distinctes ; l'histoire sort de la confusion et des ténèbres.

A mesure que ces deux puissances commerciales prirent du développement, les dénominations géographiques furent encore simplifiées. Sous le nom de Libye, les Romains désignèrent les colonies grecques depuis les autels des Philènes, au fond de la Syrte, jusqu'aux frontières de l'Égypte. Le domaine carthaginois, qui ne paraît pas avoir dépasse : les limites actuelles de la régence de Tunis, reçut le nom d'Afrique ; le reste, jusqu'au fleuve Molouïa, s'appelait Numidie ; puis venait la Mauritanie. En refoulant à l'intérieur les tribus du littoral, la civilisation carthaginoise et la civilisation grecque n'eurent pas la prétention de les anéantir, et à aucune époque elles ne parvinrent à asservir complètement les Numides et les Maures.

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2500 années de présence juive

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Mis en ligne le 26 mai 2012

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