Paris, octobre 1961. Depuis 1958, Le FLN a exporté le conflit en métropole. La France devient le théâtre d'attaques de policiers et de règlements de comptes notamment dans la capitale. À Paris, la tension est extrême. Les policiers de quartier sont équipés de gilets pare-balles. Des sacs de sable protègent les commissariats.
53 policiers ont été tués et 279 blessés.

Le 5 octobre, le préfet de police de Paris Maurice Papon, lors du conseil interministériel du Gouvernement De Gaulle Debré, instaure un couvre feu entre 20 h 30 et 5 h 30, à l'intention des seuls travailleurs algériens.

Communiqué du préfet de police de Paris du 5 octobre 1961
Dans le but de mettre un terme sans délai aux agissements criminels des terroristes algériens, des mesures nouvelles viennent d'être décidées par la Préfecture de Police. En vue d'en faciliter l'exécution, il est conseillé de la façon la plus pressante aux travailleurs musulmans algériens de s'abstenir de circuler la nuit dans les rues de Paris et de la banlieue parisienne, et plus particulièrement de 20 h 30 à 5 h 30 du matin.
D'autre part, il a été constaté que les attentats sont la plupart du temps le fait de groupes de trois ou quatre hommes. En conséquence, il est très vivement recommandé aux Français musulmans de circuler isolément, les petits groupes risquant de paraître suspects aux rondes et patrouilles de police.
Enfin, le préfet de police a décidé que les débits de boissons tenus et fréquentés par des Français musulmans d'Algérie doivent fermer chaque jour à 19 heures.

Fait à Paris, le 5 octobre 1961,
Maurice Papon, Préfet de Police.

Passant outre, la Fédération de France du FLN (clandestine) organise le 17 octobre 1961 une grande manifestation nocturne pour protester contre ce couvre feu. Environ 30.000 algériens convergent des banlieues vers le centre. La police, elle, reçoit du préfet l'ordre de ne pas laisser les Algériens défiler…

Cette manifestation est violemment réprimée. Plus de 11 000 personnes sont arrêtées dans la nuit. Entassés dans des bus, les Algériens sont transférés dans plusieurs centres de tri : le Parc des expositions, le stade Pierre-de-Coubertin et le centre d'identification de Vincennes. Le bilan officiel de la préfecture de police est de 3 morts et 64 blessés.
http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/10/17/la-bataille-de-paris-racontee-par-les-archives-du-monde_1588024_3224.html

Le nombre des victimes est contesté surtout à partir des années 80 et le fer de lance de cette contestation fut Jean Luc Einaudi, journaliste engagé, (longtemps membre du Parti communiste marxiste-léniniste de France (PCMLF)1, et rédacteur au journal L'Humanité rouge, NDLR) qui publia un livre en 1991 : " La bataille de Paris ". Le 20 mai 1998, il écrit dans " Le Monde ": " En octobre 1961, il y eut à Paris un massacre perpétré par des forces de police agissant sous les ordres de Maurice Papon ". Cet épisode fut largement médiatisé suite à la plainte pour " diffamation envers un fonctionnaire public " portée en juillet 1998 par l'ex Préfet Papon.

En 1997, la condamnation de Papon pour complicité de crimes contre l'humanité pendant la 2e guerre mondiale, conduit les médias à évoquer les autres zones d'ombre de son passé. Plusieurs élus de gauche, en particulier au PCF, réclament une reconnaissance publique du drame du 17 octobre 1961. Dès son élection en 2001, Bertrand Delanoë fait apposer une plaque reconnaissant les faits sur le pont Saint-Michel, lieu de la tuerie. Le 17 octobre 2011, au cours de la campagne présidentielle, François Hollande avait estimé que ce drame avait été " occulté des récits historiques " et qu'il était " important de rappeler ces faits ".

François Hollande dans un communiqué, a officiellement reconnu mercredi 17 octobre 2012, au nom de la République la " sanglante répression " des manifestations d'Algériens le 17 octobre 1961 à Paris.

Communiqué de la Présidence de la République

" Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l'indépendance ont été tués lors d'une sanglante répression.
La République reconnaît avec lucidité ces faits.
Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes.
"

Le Sénat reconnaît la répression du 17 octobre 1961
Six jours après la déclaration de François Hollande rompant le silence officiel sur la " répression sanglante " de la manifestation des Algériens du 17 octobre 1961, le Sénat a adopté une résolution, proposée par le groupe communiste, demandant que " la France reconnaisse ces faits " avec 174 voix pour (Communistes, Socialistes et Ecologistes, ndlr), et 168 contre sur 342 suffrages exprimés.
" C'est un acte important, tant attendu, auquel il nous revient aujourd'hui de donner toute sa portée par un vote solennel de notre assemblée ", a jugé devant la Haute assemblée Pierre Laurent au nom du PCF à l'origine de la proposition de résolution. Ce " premier pas " doit être " suivi des actes nécessaires à l'établissement définitif de la vérité et à la reconnaissance des crimes coloniaux, dont le 17 octobre 1961 constitue, avec d'autres, un épisode tragique ", a-t-il jugé. Le sénateur communiste a demandé ainsi l'ouverture de toutes les archives concernant les guerres coloniales. " Ne serait-il pas souhaitable à ce sujet que les archives de l'Etat soient soumises à des règles communes en matière d'archives conformes au fonctionnement d'un Etat démocratique ? ", a-t-il demandé. Selon lui, cela aurait "le mérite de contribuer à faire la lumière sur les agissements de la France et de son armée dans les pays africains notamment".

Ce dossier est néanmoins loin de faire l'unanimité.
L'UMP et les centristes ont voté contre. L'ancien ministre UMP Roger Karoutchi a affirmé : " Tout le monde est d'accord pour rétablir la vérité absolue ". Mais, a-t-il poursuivi, " mettons en cause les responsabilités de ceux qui ont dérapé, mais pas celle de la République ". Il s'est dit " disposé à ce qu'on ouvre les archives ".
L'ancien Premier ministre, François Fillon, s'était ainsi élevé contre un " discours de culpabilité ".
Quant au chef de file des députés UMP, Christian Jacob, il avait jugé qu'il était " intolérable de mettre en cause la police républicaine et avec elle la République tout entière ", même s'il n'était " pas question de nier les événements du 17 octobre 1961 ". Le Front national avait également fustigé un acte de " repentance ".
http://www.humanite.fr/politique/le-senat-reconnait-la-repression-du-17-octobre-1961-507060

Le gouvernement a apporté son soutien à cette résolution
Robert Hue (RDSE) a pour sa part estimé qu'il était important de disposer " d'un lieu du souvenir à la mémoire des victimes, comme le propose la résolution ".
La sénatrice écologiste, Esther Benbassa, a renchéri en demandant " plus que l'érection d'un lieu de mémoire ": " Notre devoir à nous, ici, est d'exiger que le 17 octobre 1961 trouve sa juste place dans l'histoire de notre pays ".
Par la voix d'Alain Vidalies, ministre des Relations avec le Parlement, le gouvernement a apporté son soutien à cette résolution, jugeant qu'" il faut que la vérité soit dite, sans repentance, ni accusation particulière ".
http://www.leparisien.fr/politique/le-senat-demande-la-reconnaissance-de-la-repression-du-17-octobre-1961-23-10-2012-2258767.php

Retour en haut de la page

Retour au menu "Le 17 octobre 1961"


Mis en ligne le 05 novembre 2012

Entrée  - Introduction  -   Périodes-raisons  -   Qui étaient-ils?  -   Les composantes  - L'attente  -   Le départ  -  L'accueil  -  Et après ? - Les accords d'Evian - L'indemnisation - Girouettes  -  Motif ?  -  En savoir plus  -  Lu dans la presse  -