De la petite ville algérienne de Boufarik à Marseille, Jean-Claude Beton a transformé Orangina, la boisson préparée par son père avec les fruits de la Mitidja, en un soda mondialement connu, au rythme de publicités innovantes.
A l'occasion des 75 ans de la marque, la Chambre de commerce et d'industrie Marseille-Provence rend hommage dans une exposition à ce "grand capitaine d'industrie qui avait de l'Orangina dans les veines", décrit Jacques Pfister, président de la CCI et ancien PDG d'Orangina-Schweppes.
M. Beton, aujourd'hui âgé de 86 ans, se souvient des débuts de cette aventure dont le succès l'"émerveille" encore. Tout commence à Boufarik, à une trentaine de km d'Alger, où l'entrepreneur, enfant unique, naît le 14 janvier 1925 dans une famille de commerçants prospères.
En 1936, son père, Léon Beton, sort la première bouteille d'"Orangina, soda de naranjina", à partir d'une formule élaborée par un pharmacien de Valence en Espagne. Les ingrédients: concentré d'orange, eau sucrée gazeuse et un soupçon d'huile essentielle.
Mais la guerre civile espagnole, puis la Seconde guerre mondiale stoppent le projet. "Orangina, pendant toutes ces années, fut une chimère à laquelle nous rêvions tous", relate, dans son ouvrage "Le goût des autres", Jean-Claude Beton qui, diplôme d'ingénieur agronome en poche, ressort l'idée des cartons.

Le projet se concrétise en 1951 avec la création de la société Naranjina Nord-Afrique qui fournit le concentré et gère la publicité, tandis que ses partenaires fabriquent le produit fini.
La bouteille s'arrondit et prend l'aspect granuleux des oranges. Devenue emblématique, cette forme n'est guère appréciée par les limonadiers et les embouteilleurs qui lui reprochent son ergonomie peu adaptée. Mais le jeune patron, décrit par un de ses anciens collaborateurs comme un homme à la fois "autoritaire et charmeur", "terriblement exigeant", s'entête. Très tôt il prend la mesure de "la formidable puissance" de la communication. En dessinant un zeste d'orange en guise de parasol sur fond de ciel bleu, une table de bistrot et la bouteille ventrue, l'affichiste Bernard Villemot donne une identité graphique à la marque, inaugurant une collaboration de près de 40 ans.

Après avoir séduit le Maghreb, Orangina part à la conquête de la métropole où le groupe prend officiellement ses quartiers en 1961, à l'approche de l'indépendance de l'Algérie.
Dans un contexte favorable - croissance économique, marché des sodas en expansion - M. Beton crée le "buzz" en utilisant, outre la publicité, des techniques peu banales. Des employés, ou des étudiants embauchés pour l'occasion, sont réquisitionnés pour commander des Orangina dans les cafés. Bientôt les soldats revenus d'Algérie, où ils ont pris goût à cette boisson, leur prêtent main forte.
Cinquante millions de bouteilles vendues en 1957, dix fois plus en 1975: l'ascension est fulgurante et la structure familiale de plus en plus convoitée, pour finir par être croquée en 1984 par le groupe Pernod-Ricard.
Pour son fondateur, qui gérait l'entreprise à l'ancienne, maternant ses employés (instauration des 39 heures avant 1982, intéressement et participation), une page se tourne.
Il reste à la présidence un temps, mais commence rapidement une seconde vie, tandis qu'Orangina change de mains à plusieurs reprises jusqu'à son rachat par le japonais Suntory fin 2009.
"Il a réussi à rebondir", souligne sa fille Françoise Beton, évoquant ses investissements dans les oliviers et surtout le vin avec l'acquisition du château Grand Ormeau, dans la prestigieuse appellation bordelaise Lalande-de-Pomerol, "sa deuxième petite saga"...

Anne BEADE (extraits)- Transmis par JL Granier.
http://fr-fr.facebook.com/notes/agence-france-presse/jean-claude-beton-inventeur-dorangina-et-g%C3%A9nie-de-la-communication/251197671558946


Orangina, la petite boisson secouée

Née de la rencontre en 1935 d'un docteur espagnol et d'un négociant d'huiles essentielles installé en Algérie, Orangina a retourné ses inconvénients de naissance (une forme ronde, la pulpe qui colle aux parois du verre) en arguments marketing de choc. Avec son slogan devenu fameux, " secouez, secouez-moi ", la marque a gagné le pari de l'audace publicitaire. Aujourd'hui, un milliard de petites bouteilles ventrues sont vendues dans le monde…

Orangina est née de la rencontre, à l'automne 1935 à la foire de Marseille, d'un inventeur, le docteur Trigo, et d'un visionnaire, Léon Beton. Le docteur Trigo Mirallès, pharmacien à Valence (Espagne) est l'inventeur d'un procédé permettant de conserver le jus d'orange plus longtemps : son idée consiste à mélanger un concentré de jus d'orange à de l'eau gazéifiée, le tout étant conditionné dans une bouteille granuleuse et ventrue comme une orange, avec, en guise de bouchon, une fiole renfermant de l'huile essentielle d'orange. Trigo baptise son invention " Orangina, soda de Naranjina " (naranjina signifie " petite orange " en espagnol).
Léon Beton, natif de Boufarik, quant à lui, élabore et commercialise, en Algérie, des huiles essentielles de lavande et de géranium. Il s'intéresse également aux jus de fruit, et se demande comment écouler la production d'orange d'un pays qui se couvre d'orangeraies. " Un jour, se dit-il, nous connaîtrons la formule qui permettra de boire le jus de nos oranges aux quatre coins du monde… " Après sa rencontre décisive avec le docteur Trigo, à Marseille, Beton rapporte la fameuse formule chez lui, à Boufarik, petite ville de la plaine de la Mitidja. Dès sa naissance, la marque est secouée car la guerre d'Espagne et la Seconde Guerre mondiale interrompent son développement.

UNE PETITE BOUTEILLE RONDE

C'est à Jean-Claude Beton, né le 14 janvier 1925 à Boufarik, qui a repris les activités de son père en 1947, que revient le mérite de gagner un véritable pari : celui de vendre aujourd'hui plus d'un milliard de bouteilles sur les cinq continents alors que les attributs de la marque tiennent plutôt du handicap ! Au moment de son re-lancement, de nombreux cafetiers boudent la petite bouteille ronde. Sa forme ne convient pas à la dimension des réfrigérateurs et la pulpe colle aux parois des chopes de bière. Pour autant, Jean-Claude Beton ne désarme pas : " Notre seule chance, c'est la confiance que nous avons dans cette petite bouteille ronde qui est, n'en doutons pas, la meilleure trouvaille des boissons françaises depuis la fin de la guerre. La seule chose que nous ayons à faire, c'est d'en convaincre tous les consommateurs. "Un défi relevé avec succès, puisque dès 1953, Orangina se boit sur les Champs-Élysées, et que dix ans plus tard, la marque est devenue l'une des deux premières boissons gazeuses en France. Et ce, malgré la guerre d'Algérie qui aurait pu retarder son essor. Le siège social de la société quitte finalement Boufarik pour Marseille en février 1961.

UN ZESTE DE TALENT PUBLICITAIRE

Orangina doit également son succès à un zeste de talent publicitaire : celui de Bernard Villemot, qui crée, en 1953, la première affiche avec le zeste d'orange en forme de spirale. L'affichiste signera dix-sept affiches et fera de l'écorce d'orange le logo d'Orangina. En 1972, Jean-Claude Beton croise le second bon génie publicitaire de la marque. Avec le slogan " Secouez-moi, secouez-moi ", Georges Petit, fondateur de l'agence Publi-Service (Havas), transforme la particularité d'Orangina (la pulpe déposée au fond de la bouteille) en atout.
De jeunes réalisateurs feront leurs débuts cinématographiques avec la marque, tels Jean-Jacques Annaud, Jean-Paul Goude ou Alain Chabat et son homme-bouteille (1994). Sans oublier Michel Berger et sa ligne mélodique " O-ran-gi-na ". De 1972, avec le premier film, le Tic du serveur, à 1982, la communication de la marque utilise le secouement sur le mode didactique : " Il faut secouer la bouteille d'Orangina pour bien mélanger la pulpe et le jus d'orange. " Entré dans le groupe Pernod-Ricard en 1984, Orangina inaugure, en 1985, le parrainage télé avec l'émission Cocoricocoboy de Stéphane Collaro, sur TF1. En 1989, c'est le parrainage musical avec la Lambada, suivie de la Soca en 1990, du Segâ en 1991 et de la Salsita en 1992.
La marque ne se laisse pas pour autant griser par les feux de la rampe. Ses innovations en témoignent : en 1977, Orangina est la première boisson gazeuse, en France, à être habillée d'une boîte métallique. Lancée en 1988, Orangina Light est la première boisson française aux édulcorants de synthèse. En 1991, Orangina crée le marché du " Plus " (de vitamines et de fructose) avec le produit du même nom vendu en boîte. Un petit frère naît en 1996, de couleur rouge, à base d'oranges sanguines et de guarana. De l'état liquide à l'état solide, le pas est franchi en 2001 avec des glaces fruitées...

Jean Watin-Augouard Conseil en patrimoine de marque, auteur d'Histoires de marques (Eyrolles). Photos : © Groupe Orangina Schweppes
Article publié dans le magazine Histoire d'entreprises (extraits)
http://www.histoire-entreprises.fr/he-le-magazine/orangina-la-petite-boisson-secouee/

Jean-Claude Beton, l'homme qui a transformé Orangina, boisson gazeuse née en Algérie en 1936, en un soda mondialement connu à la bouteille culte, est mort, lundi 2 décembre 2013 à Marseille, à l'âge de 88 ans.

http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2013/12/03/mort-de-jean-claude-beton-fondateur-de-la-compagnie-orangina_3524717_3382.html

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Mis en ligne le 06 octobre 2011 - Modifié le 06 décembre 2013

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