La voix de son maître |
… L'avenir de l'Algérie n'est pas une exigence de la droite ou de la gauche. Il n'est pas plus le domaine d'un clan que d'un autre. De même, l'attitude de notre pays à l'égard des autres nations du continent européen, le comportement à l'égard du bien-être des agriculteurs et des ouvriers en tout cela il n'est ni droite ni gauche qui tienne, mais un commun effort, d'abord pour choisir, ensuite pour suivre la voie de l'intérêt national. Au cours des sept derniers mois de l'année écoulée, un exemple a été donné par l'association, au sein du gouvernement, d'hommes qui ont, pour le bien commun, uni leurs efforts afin d'ôter tout caractère partisan à leur action, et même à leur pensée. Il s'agissait, ensemble, de rechercher la bonne voie, la seule voie. L'union n'a pu être entièrement maintenue au sein de l'actuel gouvernement, mais la participation au gouvernement n'est pas la seule manière de travailler côte à côte. Au sein du Parlement il faudra, entre gens de bonne foi, tenter de parler le même langage, c'est-à-dire celui de l'intérêt général et sans arrières-pensées.
Aucun objectif national, aucun objectif social, aucun objectif économique n'a de chance d'être atteint si nous nous écartons de cette règle. Or, national, social, économique, quels objectifs, cependant, ne devons-nous pas nous fixer si nous voulons être à la hauteur de notre tâche ! Dans nos préoccupations nationales, l'Algérie a la priorité absolue. Des hommes et des femmes y vivent, dont les pères ont fait l'Algérie, et qui continuent à la faire chaque jour. La France y a groupé autour de son drapeau, et par ses hautes conceptions politiques, des Européens et des Africains, les uns et les autres citoyens comme nous-mêmes. Nos concitoyens musulmans sont, comme les descendants de ceux qui ont traversé la Méditerranée, des hommes et des femmes dans le regard desquels nous voyons l'image d'une commune espérance. Il est des esprits qui pèsent avant toute chose le doit et l'avoir, les profits et les charges : disons hautement, à l'honneur de notre peuple, et spécialement à l'honneur des officiers et des soldats, que nous mettons avant toute chose cet élan des sentiments qui unit des millions d'Algériens, de la ville et du bled, dans l'affection spontanée qui crée, au-dessus et par-delà les différences d'origine, de race et de religion, la communauté d'espérance. Faut-il convaincre les calculateurs ? Montrons-leur le Sahara, ce désert où le coq gaulois s'est longtemps en vain réchauffé les ergots. Que de puissances désormais y viendraient volontiers gratter le sable brûlant ! Acceptons de les associer à une oeuvre immense qui peut ouvrir une ère nouvelle à l'Algérie et à l'Afrique, à la France et à l'Europe. A ceux que ne contente pas la vision des grandes possibilités économiques et humaines auxquelles nous accédons grâce à l'Algérie, recommandons de réfléchir au problème de notre sécurité. La France est à Alger par une nécessité fondamentale que nos ancêtres ont connue et que nous ne pouvons méconnaître sans trahir. Devant les troubles du Moyen-Orient et leurs très fâcheuses conséquences, nous pouvons mesurer la valeur de la tranquillité maintenue dans cette partie plus proche d'une mer dont ce serait une grave faute que d'oublier la capitale importance stratégique.
Osons dire, enfin, au-delà de nos sentiments profonds, au-delà des intérêts économiques et des exigences militaires, que notre siècle remet en lumière la véritable hiérarchie des valeurs politiques. Les États, leurs aspirations, leurs ambitions, leurs méthodes, ne peuvent être appréciés du seul point de vue des résultats. Les succès acquis par le mensonge, le mépris des dignités de l'homme ou de la femme, sont sans doute efficaces : ils mènent de tragédie en tragédie. La légitimité française en Algérie, dépassant le fait que l'Algérie est une création commune à divers éléments mais qui ont été soudés et fondus par l'action de la France, dépassant cet autre fait que, demain, il ne peut y avoir d'enrichissement et d'amélioration sociale que par l'effort de la France, la légitimité française, dis-je, est fondamentalement établie au regard des valeurs éternelles parce qu'elle est la seule qui soit inspirée par la volonté de fraternité humaine. Nos devoirs sont à la hauteur des si hautes raisons de notre légitimité. Devoir de sécurité et d'administration : il n'y aurait point de sécurité si l'armée n'était pas présente, l'armée de la République, l'armée de la France qui demeure fidèle à ses plus hautes traditions, non seulement au combat, mais en assurant la garde des cités, la construction des routes, l'éducation des enfants. il n'y aurait point davantage d'administration s'il n'y avait, aux côtés de l'armée, nos fonctionnaires et nos magistrats, sécurité et administration qui doivent être et qui seront demain présentes et actives aussi bien dans les villes que dans le bled. Devoir, ensuite, d'assurer la mise en valeur pour le profit commun ; l'Algérie, entre le Sahara et la Méditerranée, doit développer son agriculture et son industrie ; ses ports doivent connaître l'animation des pays en expansion qui reçoivent beaucoup, mais qui vendent tout autant, et pas seulement des matières premières, mais aussi des produits comportant une part notable de main-d'œuvre. Devoir, ensuite de précéder l'évolution sociale : l'Algérie change sous nos yeux ; bien différente de ce qu'elle était il y a vingt ans, elle sera, du point de vue des mœurs familiales, des traditions, des rapports entre individus, une Algérie, non seulement jeune, mais neuve, dans dix ans ; de cette évolution, par l'éducation des enfants, par l'émancipation des femmes, par la promotion professionnelle des hommes, nous devons prendre la tête. Devoir, ensuite, de donner des cadres techniques et politiques à l'Algérie. Un effort d'éducation a été fait depuis un demi-siècle. D'autre part, selon les lois de la démocratie, des cadres politiques viennent partager nos responsabilités. Aujourd'hui les élus à l'Assemblée Nationale, demain les élus aux nouvelles assemblées municipales et au Sénat : des hommes et des femmes d'Algérie, mêlés, d'où qu'ils viennent, dans un seul collège électoral, se lèvent, ceux grâce à qui l'Algérie se façonnera, avec ses traits propres, au sein de la souveraineté française. Devoir, enfin, d'envisager le retour à la paix. Une organisation rebelle, dont les chefs réfugiés à l'étranger reçoivent de l'étranger, avec l'or et les armes, les consignes d'une tuerie permanente, même contre nous la lutte depuis quatre ans. A qui cette lutte profite-t-elle ? Disons-le hautement ; elle profite à toutes les forces subversives, de terrorisme, de racisme, au détriment de l'ordre, de la paix et de la fraternité. La rejeter c'est autant travailler contre l'Algérie que contre la France. L'accepter ce serait hâter l'heure d'une fraternité retrouvée, d'une fraternité attendue qui ne pourra jamais sonner qu'avec la France et par la France. La création de l'Empire fut une vraie gloire de la République. Cette grande aventure demeure pour toujours à l'éloge et à l'honneur de plusieurs génération de Français. … Les multiples tâches, à peine commencées, doivent être poursuivies et réussies avec ténacité. Les difficultés seront nombreuses ; mais il est de notre intérêt, il est de l'intérêt supérieur de la liberté dans le monde, que la grande entreprise de la Communauté réponde aux espérances de ses fondateurs. Les tâches acceptées et conduites par la France au-delà de ses frontières métropolitaines, c'est au bénéfice de l'Europe, au bénéfice de l'Occident, au bénéfice de la plus humaine des civilisations que nous les avons assumées et que nous continuons à les assumer. |
Dans cet extrait est résumée et précisée l'entreprise d'enfumage à destination des incrédules et des populations. On pourrait compléter par les paroles du chef de l'état :
- " Les fins de l'œuvre de civilisation accomplie par la France dans les colonies, écarte toute idée d'autonomie, toute possibilité d'évolution hors du bloc français de l'Empire ; la constitution éventuelle, même lointaine, de self-government dans les colonies est à écarter." etc... voir ici
Tout était donc dit ? Tout était planifié avec une ferme assurance et une volonté intraitable ? |
Mis en ligne le 24 juillet 2014